Exposition du Kiébé-Kiébé à Salvador de Bahia : dans les coulisses du vernissageJeudi 12 Septembre 2013 - 15:30 Alors que sont exposées plusieurs pièces du Kiébé-Kiébé (danse initiatique des départements des Plateaux et de la Cuvette), nous avons rencontré dans les coulisses un expert, des descendants des hommes valides retirés du continent africain et une Brésilienne de souche. Voici ce que ces personnes ont déclaré L’expert du Kiébé-Kiébé, Pierre Cébert Ibocko-Onangha, préfet du département de la Cuvette, dit que c’est un honneur et une fierté pour lui de voir les pièces culturelles du département dont il est le patron, connaître une exposition internationale au Brésil. Le Kiébé-Kiébé a une double dimension : profane que tout le monde voit et une autre dimension mystique qui est le caractère exotérique de la chose, réservée exclusivement aux initiés. À ce propos, le préfet de la Cuvette pense que si les Brésiliens veulent s’imprégner de cette dimension, il faut qu’ils soient ouverts à cet exercice, autrement dit, il n’est permis à quiconque d’accéder à ce genre de savoir, car il relève des initiés. « Pour bénéficier des rudiments d’enseignement sur le Kiébé-Kiébé il faut être accepté par les initiés. Sinon, on pourrait être en droit de dire que le côté exotérique du Kiébé-Kiébé a un aspect fermé qui n’est pas accessible à tout le monde. Au moins le vernissage, tout le monde peut y participer et accéder à cette partie superficielle du Kiébé-Kiébé », a précisé l'expert, avant de donner son point de vue en ce qui concerne l’accessibilité ou pas des femmes dans cette dimension. Rappelons que le vernissage du Brésil a été préparé par les femmes. Et Pierre Cébert Ibocko-Onangha de poursuivre : « Si Lydie Pongault et Graçe Teixeira sont au-devant de la scène en ce qui concerne l’exposition du Kiébé-Kiébé, c’est parce que l’on est en train de moderniser les choses. En plus, le Kiébé-Kiébé au départ était une affaire de femmes. Les hommes s'en sont accaparé tout en apportant les aspects mystiques, exotériques, et tout ce qui s’en suit. Mais au niveau du vernissage, ce sont toutes les couches qui y sont intéressées : les femmes, les vieux, les jeunes, les enfants. Tout simplement parce que le Kiébé-Kiébé est une danse à multi facettes. Il y a des moments où l'on accepte des femmes et il y en a d’autres où on les repousse. Dans le cadre d’initiations par exemple, les femmes ne sont pas intéressées. Par rapport à ce qui se passe actuellement au Brésil, on ne peut pas dire que Lydie Pongault soit une initiée femme, non ! Parce que dans le domaine du Kiébé-Kiébé, il n’y a pas d’initiée femme. Par contre elle apparait comme une facilitatrice parce que c’est elle qui permet le transfert de cette culture au Brésil. De ce point de vue, il faut l’accepter comme telle. » Creusa Cargueija Cette femme guide interprète internationale et nationale de la région de Bahia au Brésil où elle est née bien que venant de la région de l'île de Latrique où l’on fait encore des cultes ancestraux, témoigne que c’est très intéressant de découvrir cette exposition au Brésil. « Pour nous c’est très important de découvrir cette exposition. Cela me renvoie à mon enfance, à mes grands-parents, à l’éducation de base que j’ai reçue. Bref, à mes ancêtres de l’Afrique. Je suis une métisse brésilienne avec 40% d'ancêtres africains, 40% d'ancêtres européens et 20% d'ancêtres indiens. Ce qui m’intéresse dans le Kiébé-Kiébé, c’est son côté mystique. Évidemment, c’est intéressant de découvrir la culture que l’on ne connaît pas ici mais qui vient de nos ancêtres. C’est cette culture qui est en train d’être montrée ici. Ils ont promis de nous inviter au Congo pour vivre le Kiébé-Kiébé dans son environnement. J’attends avec plaisir ce moment qui me permettra de découvrir sur place comment vivent les Congolais et comment ils s’amusent », a-t-elle déclaré. Arany Santana Secrétaire culturelle du département de Bahia, elle a préféré ne pas parler en tant que représentant du gouvernement local de Bahia, mais en tant que femme noire d’origine bantoue qui a étudié le Kikongo et le Kibangou (langues d’origine africaine). « Dès que j’ai vu l’exposition, j’ai eu envie de pleurer. C'est un grand cadeau que le Congo nous a apporté, car je suis certaine que le Kiébé-Kiébé représente mes racines. Voilà pourquoi je suis fière de votre visite ici à Bahia et j’ai bien envie de me rendre au Congo, surtout que les organisateurs de cette exposition sont dans la perspective de nous inviter au Congo. Je prie pour que l’on trouve les moyens de nous rapprocher de plus en plus. J’en profite aussi pour vous informer que je suis directrice d’un carnaval afro, et dans ce cadre, je veux bien rendre un hommage au Congo-Brazzaville. Nos écritures sont en bantou. Nous avons fait des chansons, des danses », a expliqué cette femme. Taata Konmannanjy Président de l’association culturelle bantoue de Bahia, il affirme avoir déjà connu ce qui se passe présentement à Bahia dans d’autres expositions ailleurs. « Je tiens d’abord à vous informer que j’ai des racines congolaises et des racines de Kibangou. On devrait avoir d’autres liens entre les Brésiliens et le Congo en particulier, et entre les Africains bantous en général. Parce que la plupart des Bahiannéens sont d’origine bantoue. Je m’identifie à ce que je vois ici, mais je n’ai jamais vu aucun de ces objets ici à Bahia. C’est pourquoi je me permets de dire que le côté mystique du Kiébé-Kiébé m’intéresse beaucoup, parce qu’il nous attire, nous appelle nous Kongos. Il nous invite et nous avoue quelque chose que je n’arrive pas à expliquer. Je suis ravi parce que cette exposition m’est familière », a déclaré Taata Konmannanjy. Eloa Catarine Pinto Teixeira Professeur de français à l’université de Bahia, cette Brésilienne rappelle que le musée afro-brésilien de Bahia a beaucoup travaillé pour la réalisation de cette exposition. « Je trouve qu’il y a quelque chose d’immatériel dans cette exposition. Je ne sais comment vous l’expliquer, mais ça me touche bien proprement. Pour moi la possibilité de voir le Kiébé-Kiébé représenté ici est une opportunité inoubliable. Je souhaite qu’un jour, le Kiébé-Kiébé soit pratiqué par les Brésiliens. Cela m’intéresse beaucoup et je serai alors la première à m’y mettre », a annoncé l'enseignante. De notre envoyé au Brésil, Bruno Okokana Bruno Okokana Légendes et crédits photo :Photo 1 : Pierre Cébert Ibocko-Onangha, préfet du département de la Cuvette
Photo 2 : Creusa Cargueija, guide interprète internationale et nationale de la région de Bahia au Brésil
Photo 3 : Arany Santana, secrétaire culturelle du département de Bahia verse des larmes lorsqu’elle parle de l’exposition Kiébé-Kiébé
Photo 4 : Taata Konmannanjy, président de l’association culturelle bantoue de Bahia
Photo 5 : Eloa Catarine Pinto Teixeira, professeur de français à l’université de Bahia
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