Gouvernement: des bruits sur les Premiers ministrablesMardi 10 Novembre 2015 - 15:30 Des noms se succèdent dans les conversations entendues à Brazzaville, ces derniers temps, sur les hommes qui se disputeraient le poste de Premier ministre du gouvernement post-référendum du 25 octobre. Une dizaine de personnalités parmi lesquelles les plus proches collaborateurs du chef de l’État et d’autres cadres bien connus de la scène congolaise sont citées : Isidore Mvouba, Louis Sylvain-Ngoma, Clément Mouamba, Justin Koumba, Thierry Lézin Moungalla, Antoine Nicéphore Fylla Saint-Eudes, Pierre Mabiala, Ange Edouard Poungui, Joseph Kignoumbi Kia Mboungou. Nous présenterons vaille-que-vaille un court portrait de ces Premiers ministrables, en laissant planer un gros point d’interrogation, car nous ne savons pas si les bruits décrits plus haut valent quelque chose, la décision du chef de l’Etat lui-même pouvant démentir tous les pronostics. Isidore Mvouba : ministre d’État en charge du Développement industriel et de la promotion du secteur privé, l’homme a exercé les fonctions de Premier ministre de 2005 à 2009 après avoir évolué comme directeur de cabinet du président de la République de 1997 à 1999. Fidèle du chef de l’État, il est du point de vue de la préséance protocolaire premier sur la liste du gouvernement. Le président de la République pourrait choisir de lui confier à nouveau le poste qu’il avait occupé dans un contexte que ne prévoyait pas explicitement la Constitution du 20 janvier 2002, abrogée par celle du 6 novembre. C’est un euphémisme de dire à son sujet que membre de l’Exécutif depuis plusieurs années, membre du Bureau politique du Parti congolais du travail, il connait les arcanes de la gouvernance publique. Louis Sylvain-Ngoma : général à la retraite des Forces armées congolaises, il est actuellement ambassadeur du Congo au Brésil. Compagnon du chef de l’Etat depuis toujours, il fut nommé Premier ministre par le président Marien Ngouabi en 1975, reconduit par le président du Comité militaire du Parti, Joachim Yhombi-Opango, de 1977 à 1979, puis par le président Denis Sassou N’Guesso de 1979 à 1984. Après avoir dirigé le Conseil économique et social, il retrouve la Primature en 1990-1991, où il joue un rôle important durant les travaux préparatoires de la Conférence nationale souveraine. Discret et travailleur, il est resté longtemps hors du pays du fait de ses fonctions de secrétaire général de la Commission de la Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale. Louis Sylvain-Ngoma est aussi un homme de conviction, il a le sens de la chose publique et de l’intérêt général. Clément Mouamba : économiste, Clément Mouamba fut conseiller du président Denis Sassou N’Guesso avant l’avènement de la démocratie pluraliste en 1991. Il intègre l’Union panafricaine pour la démocratie sociale, parti qui porte le président Pascal Lissouba au pouvoir en 1992. Il est alors nommé ministre des Finances du gouvernement Bongho Nouarra. On ne peut pas dire que ce régime qu’il croyait être le sien lui ait vraiment porté chance. Il est débarqué de son poste « sans explication », s’étonnait-il à l’époque, lors d’un remaniement qui a lieu pendant qu’il se trouvait en mission à l’extérieur du pays. Clément Mouamba est néanmoins un homme de pondération. Lors des consultations convoquées par le président Denis Sassou N’Guesso au mois de mai dernier, il avait passé outre les consignes de son parti pour, disait-il, ne pas refuser de répondre à l’invitation du chef de l’Etat. L’Upads l’a suspendu comme bien d’autres dirigeants pour cette raison, ce qui ne l’a pas empêché de prendre part au dialogue de Sibiti et battre campagne pour le changement de la Constitution. Il peut se réjouir d’avoir apporté sa voix au triomphe du « Oui », au référendum et, pourquoi pas, renaître en politique. Justin Koumba : le président de l’Assemblée nationale pourrait-il abandonner la chambre basse du parlement pour prendre la tête du gouvernement ? Cela ne dépend pas exclusivement de lui, mais du chef de l’Etat. Il est vrai que cet homme a accumulé une grande expérience dans la gestion des questions parlementaires pour avoir été successivement président du Conseil national de transition entre 1997 et 2002 et président de l’Assemblée nationale depuis 2009. Si son nom revient parmi ceux qui sont cités comme Premiers ministrables, il n’y a pas lieu de douter qu’il pourrait aussi souhaiter affronter une autre réalité politique, à savoir : rendre son institution actuelle plus performante devant un gouvernement que les députés pourraient « acculer » par toutes sortes de contrôles prévus par la nouvelle Constitution. Car même si l’Assemblée nationale ne pourrait avoir recours à la redoutable motion de censure contre un gouvernement dont le temps est compté, son action pourrait être plus rigoureuse en raison des pouvoirs que la nouvelle loi fondamentale confère au parlement. Thierry Lézin Moungalla : L’homme a peut-être marqué le coup dans sa nouvelle fonction de ministre de la Communication et des médias qu’il hérite dans une période sensible de la vie politique nationale. D’où des supputations grandissantes sur un préjugé favorable en sa faveur dans l’opinion. A-t-il ainsi rempli son office pour comme qui dirait voler de victoire en victoire en devenant Premier ministre, chef du gouvernement ? Aux âmes bien nées la valeur n’attend point le nombre des années dit l’adage. Thierry Lézin Moungalla, c’est indéniable a montré qu’il est combatif, débateur, capable de sanctionner et donc de diriger. Peut-être qu’il lui reste encore un bon chemin à parcourir, continuer à se former, à étoffer son agenda. Il semble néanmoins avoir commencé un job qui n’est pas fini, celui de rendre visible l’action du gouvernement congolais à l’extérieur mais également à l’intérieur du pays. Antoine Nicéphore Fylla Saint-Eudes : l’actuel président de la commission économie et finances du Sénat congolais ne manque pas d’atouts. Nyc Fylla, comme le prénomment ses fidèles a construit sa carrière politique à travers la compétition électorale engagée très tôt au sortir de la Conférence nationale souveraine de 1991. Là il fut un jeune loup, à l’instar de la plupart de ses collègues dont certains ont disparu de la scène politique faute de soutien, peut-être aussi de vision. Fylla a ambitionné par deux fois de devenir président de la République sans succès. Puis était devenu, il y a quelques années, un opposant au verbe un peu haut. Sa conquête de la mairie de Brazzaville a aussi tourné court. De guerre lasse, pourrait-on dire, le président du Parti républicain et libéral dirige désormais une coalition de formations et associations politiques de la même obédience politique que lui, non sans recadrage constant. Réaliste, il rejette tout radicalisme en politique, a pris part aux consultations présidentielles et au dialogue inclusif de Sibiti. Il peut avoir sa carte à jouer dans l’exécutif. Pierre Mabiala : en connaissez-vous d’aussi batailleur au sens noble du terme que cet homme dans le moment présent ? Sans doute non. Durant la campagne en vue du référendum du 25 octobre, Pierre Mabiala est allé à la rencontre des électeurs potentiels de sa famille politique dans son Niari natal. On l’a ainsi vu mobiliser du monde pour la cause, appeler à l’unité les filles et fils du Niari et dire le bien-fondé pour eux, et pour tous les Congolais de bannir la violence. Avec Justin Koumba, Pierre Mabiala, est peut-être aussi, l’homme par qui le débat houleux sur le changement de la Constitution du 20 janvier a quitté les enceintes feutrées des états-majors politiques pour la place publique. Comme l’ancien ministre de l’Intérieur et de la décentralisation, Alexis Gabou revendiquait la paternité de la loi fondamentale post-conférence nationale souveraine, le ministre des Affaires foncières et du domaine public peut, toute proportion gardée, observer avec satisfaction le cours des événements. Joseph Kignoumbi Kia Mboungou : quel Premier ministre ferait-il, le président de la Chaîne ? Celui du rassemblement sans doute, mais abandonnerait-il en ce moment son ambition plusieurs fois exprimée dans les urnes de conquérir la présidence de la République. La Constitution actuelle, qu’il n’a pas votée, est muette sur le sort réservé au Premier ministre s’il souhaite être candidat à la fonction suprême. Député Upads de Sibiti 1, il est en rupture de ban avec son parti pour avoir pris part aux consultations présidentielles et au dialogue de Sibiti. Cela serait tout de même politiquement raté pour lui de refuser d’accueillir ou d’accompagner les hôtes du dialogue dans sa circonscription électorale. Ayant combattu par le verbe le changement de la Constitution du 20 janvier, il a tenté avec Anguios Nganguia Engambé, une médiation entre l’opposition et la majorité présidentielle au moment où la situation était tendue. Avec des fortunes diverses. Disant s’être engagé en politique pour l’intérêt général, Kignoumbi Kia Mboungou a depuis inscrit son action dans la concertation et le dialogue. Ange Edouard Poungui : Sénateur de l’Upads, il est passé par la case sanction comme Clément Mouamba, Joseph Kignoumbi Kia Mboungou et bien d’autres dirigeants de ce parti après qu’ils aient été vus au Palais du peuple, chez le président de la République, lors des consultations politiques. Cet ancien du Parti congolais du travail fut Premier ministre entre 1984 et 1989. Exilé pendant plusieurs années du fait de la guerre du 5 juin 1997, Ange Edouard Poungui, avait tenté de se porter candidat à l’élection présidentielle de 2009 pour le compte de son parti. Sa candidature ne fut pas retenue par la Cour constitutionnelle. Depuis, il est sénateur et se fait de moins en moins parler de lui, et la toute dernière fois c’est lorsqu’il rencontre le chef de l’Etat comme signalé plus haut. Ses chances pour décrocher le poste de Premier ministre sont à mettre au compte du rôle que le président de la République souhaiterait assigner à son futur chef de l’exécutif. Notre gros point d’interrogation : cette case vide est réservée à la « surprise » du chef. Car un gouvernement c’est à la fois le Premier ministre et les ministres. Seul le président de la République connaît l’homme ou la femme qu’il fera Premier ministre, chef du gouvernement dans le moment présent. Cela s’appelle son pouvoir discrétionnaire. Attendons donc ! Gankama N'Siah Notification:Non |