Franc CFA : une monnaie anachronique, et de « servitude volontaire » selon Carlos Lopes

Lundi 3 Octobre 2016 - 13:30

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Le secrétaire général démissionnaire de la Commission économique  de l’ONU pour l’Afrique (CEA), Carlos Lopes, dénonce « la servitude volontaire » que crée le franc CFA sur les pays de la zone franc.

Il a fait cette annonce la veille de la réunion de la zone franc à Paris. Le sujet n’était pas à l’ordre du jour lors de cette réunion, le 30 septembre à Paris. Pourtant, la question gagne observateurs, intellectuels et hommes politiques africains, sauf les institutions régionales d’Afrique francophone.

Le franc CFA, "un système désuet et inadapté"

Pour Carlos Lopes, c’est « un système désuet et inadapté ». Il appelle à une discussion sur la zone franc, rappelant qu’« aucun pays au monde ne peut avoir une politique monétaire immuable depuis trente ans  cela existe dans la zone franc. Il y a donc quelque chose qui cloche ».  L’une des particularités du franc CFA est que c’est la seule monnaie qui aura survécu à la décolonisation et maintenue alors que la France a tourné le dos au franc français, sa monnaie de référence.

La question du maintien de ce lien achoppe. Ses opposants expliquent qu’il limite la marge de manœuvre des pays qui l’utilisent. Ils plaident en faveur des situations économiques différentes. Carlos Lopes y voit  un mécanisme « inadapté à la conjoncture internationale qui est très dynamique ». Des propos accentuent le besoin au sein de la communauté intellectuelle africaine d’un débat sur les réformes au sein de la Zone franc, dont la monnaie reste liée au sort de l’Euro, pour 155  millions d’habitants de l’espace économique et monétaire d’Afrique francophone subsaharienne.

L’ancien ministre togolais et directeur de la Francophonie économique, Kako Nubukpo propose plutôt un arrimage sur un panier de devis, considérant que le gage de stabilité du franc CFA  présente « l’inconvénient de contraindre les Etats membres à calquer leur politique sur l’euro ».

Afrique centrale et Afrique  de l’ouest : émergence possible ou pas avec le franc CFA ?

En France, on assimile l’attachement au franc CFA (franc des colonies françaises d’Afrique : 8 pays d’Afrique de l’Ouest, 6 pays d’Afrique centrale, les Comores + la France - date du 26 décembre 1946),  à une « vertu protectrice », à une zone permettant à ses membres de bénéficier d’une grande stabilité des prix, une inflation inférieure à celle des autres pays africains ; une seule dévaluation, en 1994.

La majorité des Africains soutiennent un manque de souveraineté, « un prolongement de la colonisation ». Cette monnaie est vue comme « une mythique,  un symbole de la colonisation française en Afrique », soulignent-ils. Malgré que son arrimage limite les risques de volatilité, nombreux sont les experts africains qui dénoncent cet arrimage à la devise européenne, estimant  que celui-ci freine le développement des pays de la zone franc.

Les trois principes du franc CFA

  • à la différence des monnaies soumises à un régime de change variable, la valeur du FCFA par rapport au franc français hier, et à l’euro aujourd’hui, ne change pas au jour le jour. Sa parité est fixe ;
  • la convertibilité des monnaies émises par les banques centrales de la zone franc est garantie, sans limite, par le trésor français. En contrepartie, les réserves de change sont centralisées à deux niveaux : auprès des banques centrales des Etats africains dans chaque sous-région, et auprès du trésor français avec le dépôt d’au moins la moitié de ces réserves de change ;
  • enfin, les transferts de capitaux seraient en principe « libres » au sein de la zone franc.
Noël Ndong

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