L’Italie : première Journée de mémoire des victimes de l’immigration

Lundi 3 Octobre 2016 - 18:18

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Humanitaires, secouristes, élus et survivants des naufrages sont venus à Lampedusa faire mémoire des migrants morts en tentant de gagner l’Europe.

Pour la première fois, une Journée de mémoire pour les victimes de l’immigration a été célébrée lundi, en Italie. Différents membres d’associations de victimes, maires, parlementaires et agents de sauvetage se sont donnés rendez-vous sur le petit port sicilien de Lampedusa pour dire, à la mer et au monde, leurs regrets pour les disparus sur le chemin du désespoir. La date choisie, un 3 octobre, renvoi à l’effroyable naufrage d’un chalutier aux larges des côtes de Sicile, le 3 octobre 2013.

Quelque 368 migrants entassés dans les cales du navire en avarie avaient coulé avec celui-ci, lorsque des dizaines de personnes s’étaient retrouvées tout d’un côté du bateau le faisant gîter et sombrer. C’est seulement cette année, trois ans après les faits, que la totalité des corps a pu être extraite du navire renfloué. Mais les enquêtes se poursuivent en vue de leur identification et pour leur restitution éventuelle aux familles ou, sans doute plus vraisemblable, leur sépulture dans quelque cimetière d’Italie.

Ce drame figure parmi les plus horribles de l’histoire des traversées des migrants en Méditerranée. La date a été choisie pour une manifestation officielle chaque année, mais à quelles fins ? Depuis trois ans, le nombre de morts n’a cessé d’augmenter en Mer Méditerranée, où il ne se passe pas une semaine qu’un canot en avarie ne soit secouru par les très louables garde-côtes italiens. Les chiffres officiels indiquent que depuis 2013 un total de 11.500 cadavres a été repêché en Méditerranée où 270.000 migrants sont passés pour tenter de gagner l’Europe.

Drame dans le drame, les survivants du naufrage du 3 octobre 2013 furent traduits en justice pour entrée frauduleuse en Italie, alors que « le capitaine » du rafiot, un Tunisien de 35 ans, croupit en prison où il attend d’expier sa peine. Rien de tout, cela n’a dissuadé quiconque de tenter sa chance, pas plus que les nombreux corps desséchés que l’on trouve régulièrement dans le désert du Sahara, où même les corps éviscérés abandonnés dans des morgues en Egypte ou en Libye : des victimes d’un autre trafic, celui des organes humains documenté par une association érythréenne.

Le 21 mars 2016, l’Italie décrétait que le 3 octobre on célébrerait sur son sol une Journée, « pour conserver et renouveler la mémoire de ceux qui ont perdu la vie dans la tentative d’émigrer vers (notre) pays, en fuyant les guerres, les persécutions et la misère ». Beau geste diversement apprécié, et surtout fortement critiqué par l’extrême-droite italienne, qui y voit un gaspillage d’argent pour des migrants qu’il faudrait renvoyer, tous, chez eux, selon un parti comme la Ligue du Nord .

Lucien Mpama

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