Université d’Anvers : un amphithéâtre va porter le nom de Patrice Lumumba

Mercredi 18 Janvier 2023 - 14:42

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L’inauguration de l’amphithéâtre Patrice-Lumumba aura lieu le 31 mars à 15h sur le campus de Middelheim, a indiqué l’université d’Anvers, en Belgique. Selon cette dernière, c'est la première fois dans ce pays qu’un bâtiment officiel (ou une partie de bâtiment) sera baptisé du nom de l’ancien Premier ministre congolais.

 

L’« Amphithéâtre Patrice-Lumumba », explique l’université, sera inauguré en hommage au premier Premier ministre du Congo indépendant, assassiné le 17 janvier 1961. « Un meurtre commis avec la complicité de certains de nos compatriotes et au su et au vu du gouvernement belge. Nous nous souvenons de Lumumba comme d’une figure marquante de notre histoire coloniale, un symbole d’émancipation, d’égalité et de respect des droits humains », indique l’université.

Le campus Middelheim de l’université d’Anvers a un lien direct avec le passé colonial de la Belgique au Congo, au Rwanda et au Burundi, a fait savoir le recteur Herman Van Goethem, sur le site de l’université. « Ce campus a, en effet, accueilli, jusqu’en 1962, la Haute-École coloniale, où les hommes belges recevaient un enseignement d’élite avant de partir diriger les colonies belges. Le rectorat de l’université est, d’ailleurs, situé dans le bâtiment principal de cet ancien établissement. Le service administratif du personnel, lui, est installé dans une annexe, qui est une réplique de la maison coloniale du gouverneur belge à Léopoldville, Kinshasa. À droite du rectorat se trouve aussi un petit monument envahi par la végétation, complètement oublié, qui avait été érigé à la mémoire des Belges anversois morts dans l’État indépendant du Congo, donc avant 1908.   En tant que recteur, je voudrais que nous puissions discuter plus ouvertement et plus librement de cet héritage. Le 31 mars, l’auditoire du bâtiment colonial principal sera solennellement baptisé « Auditoire Patrice-Lumumba », explique  le recteur de l’université d’Anvers.

Un symbole d’émancipation, d’égalité et de respect des droits humains

Ce dernier rappelle que Patrice Lumumba est devenu Premier ministre du Congo indépendant en 1960, avant d’être assassiné le 17 janvier 1961, il y a 62 ans. « Ce meurtre a été commis avec la complicité de Belges et au vu et au su du gouvernement belge », précise Herman Van Goethem. Pour lui,  Patrice Lumumba avait notamment dénoncé à l’époque ce qu’une commission parlementaire belge a également établi il y a peu : « la domination et l’exploitation coloniales, les violences et les atrocités, les violations individuelles et collectives des droits humains durant cette période, ainsi que le racisme et la discrimination qui les ont accompagnées ».

Au cours des décennies qui ont suivi sa mort, a poursuivi Herman Van Goethem, Patrice Lumumba s’est en quelque sorte transcendé, devenant un symbole d’émancipation, d’égalité et de respect des droits humains.

« À travers cette cérémonie du 31 mars, qui se déroulera en présence de membres de la famille de feu le Premier ministre Lumumba, un ancien bâtiment officiel belge sera donc rebaptisé à son nom, en hommage à son action. Et pour que chacun et chacune puisse réfléchir au monde que nous voulons… Si les actions symboliques sont importantes, elles ne suffisent pas pour assumer notre passé colonial. Des actions structurelles visant à revisiter notre mission et notre culture universitaire, et au besoin à les rectifier, sont également nécessaires », a fait savoir le recteur.

Selon lui, le débat sur la décolonisation est vivace au sein de l’université d’Anvers, tout comme ailleurs. Un élément fondamental dans ce débat, a-t-il indiqué, est qu'il n’est pas rare que des personnes issues de l’immigration, venues d’Afrique ou d’ailleurs, soient confrontées au racisme structurel, aux préjugés et à des micro-agressions, parfois aussi au sein de l'université elle-même.

« Le débat sur la décolonisation est avant tout un débat sur le monde que nous souhaitons, que nous voulons voir naître. Ce débat est aussi un débat sur notre passé : la façon dont nous abordons notre histoire reflète, en effet, la façon dont nous voyons notre avenir », a expliqué Herman Van Goethem.

Evénement académique et film sur Lumumba

L’inauguration sera précédée par un événement académique axé sur les universités qui ont été des instruments importants de la « matrice du pouvoir colonial » et  qui ont fait la promotion de la science, de la connaissance et des méthodes occidentales comme « universelles et abstraites ».

Au cours de cet événement académique, explique-t-on, l’université d’Anvers souhaite examiner cette réflexion ainsi que la façon dont elle se traduit en pratique dans les universités. « En compagnie de deux orateurs et de cinq panélistes, nous réfléchirons aux héritages coloniaux dans la production de la connaissance et à leurs effets sur les (infra)structures de nos universités. Nous discuterons également des possibilités de décoloniser nos universités, en créant un espace favorisant l’émergence de nouvelles ontologies, épistémologies et méthodologies, non pas pour créer de nouveaux «universaux», mais des «pluriversaux». Les étudiants étrangers présenteront leurs propres recherches sur le passé colonial et le futur décolonisé de lUniversité dAnvers », a-t-il ajouté.

Bien avant, le 21 mars, l’association d’étudiants Ayo organisera une projection d’un film sur Patrice Lumumba, en collaboration avec l’université d’Anvers. Le film biographique, réalisé en 2000, montre l’ascension et la chute de Patrice Lumumba, et se déroule dans les mois précédant et suivant l’indépendance du Congo vis-à-vis de la Belgique en juin 1960. La projection du film sera suivie d’un débat en petits groupes d’étudiants. 

 

 

 

Patrick Ndungidi

Légendes et crédits photo : 

1- Le Campus Middelheim de l’université d’Anvers 2- Le futur amphithéâtre Patrice-Lumumba

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