Les souvenirs de la musique congolaise : origine et explosion de la danse « Boucher » dans les deux Congo

Jeudi 16 Février 2023 - 18:32

Abonnez-vous

  • Augmenter
  • Normal

Current Size: 100%

Version imprimable

Au cours des années 1965, 1966 et 1967, le microcosme musical congolais des deux rives du fleuve Congo vibre au rythme de la danse « Boucher », à l’instar de la rumba (danse mythique de la musique congolaise), du tango, du boléro, du chachacha, de la Ssalsa… que les Congolais aimaient depuis la nuit des temps. Cette danse fut créée par un boucher du Marché Total de Bacongo, à Brazzaville, et connut sa gloire en 1965 lors des Premiers Jeux africains organisés à Brazzaville, du 18 au 25 juillet.

Pour la petite histoire, le « Boucher » ou danse des bouchers a son origine à Brazzaville, plus précisément au Marché Total de Bacongo. Son géniteur fut un boucher très célèbre du nom de Ghonda, spécialiste en abattage des bœufs. « Ya Ghonda », comme aimaient bien l’appeler ses admirateurs, fut un personnage très méticuleux portant toujours un tablier blanc et une toque blanche.

Pour attirer la clientèle vers son étalage, il inventa une gestuelle métronomique « dont les mouvements étaient ponctués par deux à trois pas en avant, la jambe droite envoyée en avant suivie par un coup de rein en avant, le bras droit levé tenant une machette ou un couperet et qui s’abat sur un quartier ou un morceau de viande de bœuf à servir au client ».

Cette gestuelle était reprise une ou plusieurs fois par notre boucher devant les clients. Ce qui deviendra plus tard non seulement une attirance de la clientèle, en particulier féminine très étonnée par ce petit spectacle, mais aussi le fondement de la danse « Boucher ». D’où l’afflux de la clientèle devant son étalage. Au fil du temps, ce petit spectacle qu’offrait Ya Ghonda à sa clientèle deviendra célèbre et connaÏtra une ampleur parmi les autres bouchers du Marché Total de Bacongo qui l’adopteront par la suite.  Unanimement à la fin de la journée, ils se retrouvaient au bar Tahiti, en face du marché (actuel site de la Pharmacie Tahiti), où chacun, après avoir fait le bilan de la journée (en terme de recettes), exhibait la gestuelle transformée en danse au rythme de la musique du bar, sous les regards des badauds et des curieux. A leur tour, ils allaient colporter ce geste dans tous les quartiers de Brazzaville.

Ensuite, sur l’initiative de Ya Ghonda, un club dit des « Bouchers » sera mis en place, patronné par ce dernier et composé d'Edouard Batolaalias Lavaraide, Basangoula, Nidelfe, Alexis, Balla, Perce, Meilleur, Calmence et autres bouchers du Marché Total de Bacongo…

Ce club bien organisé et structuré avait pour siège le bar Pigalle, à Bacongo, qui deviendra plus tard un haut lieu d’exhibition et de démonstration de la danse « Boucher » lors des prestations des orchestres Bantous de la capitale, Ok jazz, Africain fiesta, Négro Band, Tembo qui furent invités tour à tour par le Club des bouchers en vue de promouvoir et vulgariser la danse « Boucher ».

Cette danse devenue populaire à Brazzaville, un groupe des jeunes célèbres va naître, composé de Wello, Berba, Oro, Bringo qui, à l’occasion de l’ouverture des Premiers Jeux africains organisés à Brazzaville du 18 au 25 juillet 1965, fera une démonstration en public de la danse « Boucher », au rythme des Bantous de la capitale, au stade Omnisport (actuel stade Alphonse-Massamba-Débat) devant le président Alphonse Massamba- Débat. La jeunesse africaine venue participer aux Jeux l’adoptera à son tour car lors des soirées récréatives, les athlètes africains allaient admirer et exhiber la danse « Boucher » dans les bars dancing de Brazzaville, tels que Faignond, Super jazz, Elysée bar…

Désormais l’Afrique dansera au rythme du « Boucher ».

Auguste Ken-Nkenkela

Légendes et crédits photo : 

Le bar Pigalle, à Bacongo, deviendra plus tard un haut lieu d’exhibition de la danse « Boucher »

Notification: 

Non