Énergie : Thomas Opoko met en lumière la fragilité du système électrique congolais

Samedi 19 Octobre 2013 - 14:45

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Au regard des problèmes récurrents que connaît le système électrique national et des besoins stratégiques d’industrialisation, l’universitaire et directeur de l’électricité et des ressources énergétiques au ministère de l’Énergie et de l’Hydraulique nous a partagé sa réflexion, dont voici un extrait. Il insiste sur la nécessité d’une puissante source de production d’énergie dans l’extrême nord du pays

En raison de la croissance rapide de la demande énergétique enregistrée du fait des projets industriels et miniers, le pays envisage renforcer à terme sa capacité de production d’énergie à travers l’extension de la centrale à gaz, dite Centrale électrique du Congo (CEC), de Pointe-Noire en augmentant sa puissance installée de 300MW à 900MW, la mise en valeur des grands sites hydroélectriques aménageables du pays que sont Sounda (1000MW) dans le département du Kouilou, Chollet (600MW) dans le département de la Sangha et Kouembali (150MW) sur la rivière Lefini, ainsi que la densification de son réseau de transport d’énergie et le développement des interconnexions électriques  avec les pays voisins.

Cependant, en observant de près l’exploitation du système électrique congolais, on constate que seul le segment du réseau de transport allant de Pointe-Noire jusqu’à Ngo bénéficie d’un minimum de sécurité d’alimentation électrique des usagers en cas d’indisponibilité d’une de ses lignes. Pour l’illustrer imaginons quelques cas de figures.

Premièrement, en cas d’indisponibilité du tronçon de ligne Pointe-Noire–Loudima, la ville de Pointe-Noire continue d’être alimentée en électricité à partir des centrales à gaz. Il en sera de même pour le reste du réseau électrique national qui conservera son alimentation à partir des centrales de Moukoukoulou et d’Imboulou, avec la possibilité d’un apport d’énergie de la centrale d’Inga.

Deuxièmement, en cas d’indisponibilité du tronçon de ligne Loudima–Brazzaville, la ville de Pointe-Noire et toutes les localités raccordées au réseau de transport des départements de la Bouenza et du Niari resteront alimentées par les centrales à gaz et Moukoukoulou. De la même manière, la ville de Brazzaville et l’ensemble du réseau nord continueront d’être desservis en électricité par la centrale d’Imboulou, avec la possibilité d’un apport d’énergie en provenance d’Inga.

Troisièmement, en cas d’indisponibilité du tronçon de ligne Brazzaville–Ngo, l’ensemble du réseau de transport d’énergie situé entre Brazzaville et Pointe-Noire restera alimenté à partir des centrales à gaz et Moukoukoulou, avec la possibilité d’un apport d’énergie d’Inga. Le réseau de transport d’énergie situé au nord de Ngo, quant à lui, continuera d’être desservi par la centrale d’Imboulou.

Cependant, en cas d’indisponibilité du tronçon de ligne Ngo–Djambala, la ville de Djambala perd instantanément son unique source d’alimentation pérenne en électricité, sans aucune possibilité de secours permanent. De même, en cas d’indisponibilité du tronçon de ligne Ngo–Gamboma, tout le réseau de transport allant de Ngo jusqu’à Owando et Boundji perd instantanément la tension, sans aucune possibilité de secours permanent.

L’analyse des deux dernières hypothèses montre à suffisance que, dans la configuration actuelle du système électrique congolais, l’alimentation des usagers, tant domestiques qu’industriels, à partir des lignes de transport Ngo–Djambala et Ngo–Owando et Boundji reste fragile.

Garantir la sécurité, la fiabilité et la stabilité

Dans le souci d’assurer au futur système électrique un fonctionnement sécurisé, fiable et stable, tout en garantissant sur l’ensemble du territoire national un meilleur service public de l’électricité, il est souhaitable que sa planification tienne compte d’un certain nombre de considérations.

Quelle que soit l’importance de la puissance électrique pouvant être disponible à Pointe-Noire (centrale à gaz CEC, centrale hydroélectrique de Sounda et ligne d’interconnexion Inga–Cabinda–Pointe-Noire), elle ne pourra au maximum transiter vers Brazzaville et le réseau nord du pays que les 250MW qui constituent en théorie la capacité de transit de la ligne de transport d’énergie Brazzaville–Pointe-Noire.

De plus, cette grande quantité d’énergie n’aura aucun impact majeur sur la fragilité des lignes Ngo–Djambala et Ngo–Owando et Bondji évoquée ci-dessus. Le surplus d’énergie disponible ne pourra donc être consommé que par les usagers domestiques et industriels de la région de Pointe-Noire.

Son écoulement, même en partie, vers tous centres de consommation en dehors de Pointe-Noire devra requérir  le renforcement de la capacité de transit de la ligne de transport d’énergie existante et/ou la construction de lignes de transport dédiées.

La construction à terme d’une puissante source de production d’énergie dans l’extrême nord du pays, telle que la centrale hydroélectrique de Chollet, qui offre en plus une possibilité d’interconnexion électrique avec les pays voisins, et d’une ligne de transport d’énergie entre les localités de Djambala, Zanaga et Loudima pourra résoudre le problème de la fragilité des lignes évoquées ci-dessus et  garantir au  système électrique congolais un développement harmonieux sur une grande partie du territoire national.

Thierry Noungou