Discours de l'ambassadeur de France

Samedi 15 Juillet 2023 - 18:00

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« Case de Gaulle » - Bacongo - BRAZZAVILLE                                  vendredi 14 Juillet 2023

 

Célébration de la Fête nationale française

 

Excellence, Monsieur le Premier Ministre ; Excellence, Monsieur le Ministre des Affaires étrangères,

Madame la Présidente, Chère Emilienne ;

Mesdames et Messieurs les Ministres, Chers collègues Ambassadeurs,

Chers invités et membres de « l’Equipe France au Congo », chers compatriotes et chers amis.

 

Je suis très heureux de vous souhaiter la bienvenue à la Case de Gaulle pour cette nouvelle célébration au Congo de la Fête nationale de la République française. Il s’agira de ma 4e et dernière édition parmi vous, devant passer le relais, à la fin de l’été, à une Ambassadrice de France au Congo --une première pour le coup !--, ma collègue Claire Bodonyi, à laquelle je suis certain que vous réserverez le meilleur accueil.

 

Avant tout, je souhaite m’acquitter d’une agréable obligation, celle de remercier les nombreux partenaires privés qui me permettent de vous accueillir ce soir encore, dans les meilleures conditions. Je veux citer : Africa Global Logistics, avec TBC Brazzaville et Congo Terminal Pointe-Noire ; AG Partners Congo ; BRALICO ; BUROTEC ; Canal + ; Géant CASINO ; Congo Handling ; EGIS ; GIFA Sécurité ; Groupe FORTUNE ; Mayo ; Olam Agri (C.I.B) ; Olympic Palace ; PAUL ; PRIMA MARKET Congo ; RAZEL BEC ; SNEF Congo ; Société Générale Congo ; (Grasset) SPORAFRIC ; STHIC (Service Technique Henry Industrie) ; SUNU Assurances ; Total Energies.

 

Monsieur le Premier Ministre, chers invités,

 

Quitter un pays où l’on a vécu quatre années, n’est jamais anodin, particulièrement s’agissant d’une terre aussi hospitalière que le Congo ! Humainement parlant, les départs ne sont assurément pas la dimension la plus agréable du métier de Diplomate !

 

A l’occasion des trois précédentes célébrations du 14 Juillet, j’ai pu, à ce pupitre, évoquer devant vous un certain nombre de thèmes sur lesquels je me suis efforcé, à chaque fois, d’exprimer le plus honnêtement possible ma pensée et de traduire mes convictions. Permettez-moi d’en rappeler quatre, qui me sont particulièrement chers :

 

  • en premier lieu, la force de ce lien humain, unique et indéfectible qui, par-delà le temps et les épreuves, unit la France et le Congo dans la fierté de leur histoire commune. Mais aussi la nécessité évidente de mieux reconnaître l’importance cruciale de ce que la France doit à l’Afrique, et à l’Afrique centrale en particulier, dont la capitale historique, « Brazzaville, fût », selon les mots du Général de Gaulle, « durant ces terribles années, le refuge de notre Honneur et de notre Indépendance ». Cette reconnaissance doit être le socle d’un réengagement confiant et déterminé de la France et, au-delà, de l’Europe, aux côtés de l’Afrique émergente, voisine, afin de valoriser au mieux leurs destins inextricablement noués ;

 

  • ensuite, l’obligation que nous avons apprise de la terrible crise sanitaire du Covid-19, d’identifier et de comprendre, pour les corriger, les excès de cette mondialisation et des modes de consommation débridés qui ont mis à jour nos fragilités et nos injustices. Il s’agit de repenser et de mettre en œuvre de nouvelles relations plus équilibrées, une solidarité renforcée, plus indispensable que jamais, afin de pouvoir faire face, ensemble, comme partenaires égaux, aux défis de plus en plus planétaires de notre temps, au premier rang desquels la lutte contre le changement climatique et la protection de la bio-diversité ;

 

  • puis, l’exigence citoyenne, trop longtemps négligée, d’une nouvelle gouvernance et d’une association crédible à la gestion de la chose publique. Nous devons entendre cette expression forte, et parfois violente, sous peine d’un mortel repli identitaire, d’une stérile mise en cause systématique de la parole publique et, plus généralement, d’un essoufflement extrêmement préoccupant de nos démocraties. Ainsi, la défense de « l’inspiration démocratique » est-elle un combat permanent, à mener avec humilité, pragmatisme, exemplarité et responsabilité, au service du Citoyen et de chaque Peuple ;

 

  • enfin, nourrie par le sentiment d’abandon et d’incompréhension qu’éprouve une partie du peuple de France face à l’accélération parfois insensée du Monde, cette dérive de notre Pacte social doit être rapidement stoppée par le rétablissement de l’égalité des chances et de la méritocratie républicaine. Ceci exige la consolidation de l’Ecole de la République et la restauration de cette « Participation » gaullienne qui vise « à faire en sorte que les hommes qui accomplissent une œuvre commune, soient assez près les uns des autres pour se comprendre, pour s’expliquer et pour s’associer ». La sauvegarde de notre « savoir vivre ensemble », respectueux des choix de chacun et de la liberté de tous, est ici en jeu !

 

Monsieur le Premier Ministre, Monsieur le Ministre,

 

Un départ offre aussi l’opportunité de jeter, avec le plus de lucidité possible, un œil sur le chemin parcouru, avec ses succès, mais aussi son lot d’échecs ; et d’essayer d’en tirer, avec ambition et réalisme, des perspectives d’avenir. Ce temps est donc venu.

 

Au chapitre des satisfactions, je veux retenir :

 

  • tout d’abord, celle d’avoir vu le Congo parvenir, malgré l’adversité -je pense notamment à la crise sanitaire à laquelle le Gouvernement congolais a fait face avec courage et efficacité- parvenir, disais-je, à redresser ses perspectives économiques. Par son appui technique, qui va encore se renforcer en septembre avec l’affectation d’un Expert auprès du Ministre du Budget, et son Prêt de Soutien budgétaire, la France est fière de contribuer à la meilleure mise en œuvre possible de l’indispensable réforme de la gouvernance publique que conduisent les autorités, avec l’aide du FMI, en vue de consolider les fondamentaux de l’Economie. Ce travail d’assainissement requiert des décisions difficiles, parfois douloureuses, dont l’impact social doit être anticipé et traité avec la plus grande attention ;

 

  • une seconde satisfaction est de constater que le farouche plaidoyer international que mène Brazzaville en faveur de la bonne prise en compte et de la juste valorisation du remarquable trésor environnemental que constituent les forêts et les tourbières du Bassin du Congo, ne cesse de gagner du terrain, comme nous l’avons vu lors du récent Sommet de Paris sur le nouveau Pacte financier mondial. Là encore, la France se flatte, avec d’autre partenaires, dont européens, d’appuyer les ambitions congolaises et régionales, avec notamment : (i) l’Initiative pour les Forêts d’Afrique centrale/CAFI ; (ii) la finalisation, en vue de la COP28, d’un partenariat novateur visant à protéger et rémunérer le capital naturel, tout en promouvant les intérêts des populations locales, mais aussi à mettre en œuvre l’objectif « 30 % des terres et des mers protégées d’ici 2030 » ; (iii) ou encore, le tout nouveau projet français d’Ecole nationale à Vocation régionale (ENVR) « Protection de la bio-diversité », qui doit être implantée au Congo ;

 

  • à propos d’ENVR, je me félicite également de la vitalité constante de notre belle Ecole Génie Travaux (EGT) de Kintélé, dont l’audience et le périmètre, après 14 années d’existence, ne cessent de s’élargir, en intégrant en particulier l’ouverture bienvenue de cet établissement d’origine militaire sur l’ensemble de la société congolaise. Ce même dynamisme caractérise aussi l’engagement renouvelé des autorités congolaises, avec le soutien que la France et l’Union européenne leur apportent, dans le domaine éminemment interministériel de l’Action de l’Etat en Mer et dans les Eaux continentales (AEM-EC) ;

 

  • une autre satisfaction réside dans la permanence et la force de l’engagement français dans la promotion des cultures et le soutien aux industries créatives, à travers notamment l’action déterminante des deux antennes de l’Institut français du Congo (IFC), à Brazzaville et Pointe-Noire. Comme l’a annoncé le Président Macron, lors de sa visite du 03 mars, la France entend poursuivre et renforcer son partenariat, engagé de longue date avec le Congo, dans la préservation et la valorisation de son patrimoine culturel (la Rumba congolaise….) et mémoriel, dont architectural (je pense au CFRAD, dans le fil de la célébration de « 2020, l’Année de Gaulle à Brazzaville ») ; et ceci en lien avec l’éclosion espérée d’un tourisme éco-mémoriel de qualité autour du Royaume de Loango, du CFCO, de l’Alliance Brazza-Makoko, de la « Capitale de la France Libre », du fleuve Congo et bien sûr des grandes forêts du Nord ;

 

  • à l’évidence, le Lycée français Saint-Exupéry de Brazzaville est un autre sujet de satisfaction. En effet, les importants travaux d’extension qui viennent de s’achever, grâce à un geste fort du Président de la République congolaise, Son Excellence Monsieur Denis SASSOU N’GUESSO, auquel je renouvelle ici mes sincères remerciements, ainsi que la mise en place d’un ambitieux projet de modernisation pédagogique (dont l’instauration d’un « BAC français international ») doivent lui permettre de conforter son statut d’établissement de référence ouvert sur la ville, au service de la formation des jeunes français, congolais et de bien d’autres nationalités, futurs citoyens du Monde autonomes et responsables ;

 

  • toujours au « rayon Jeunesse », je me réjouis que mon pays reste engagé de façon déterminée sur la formation professionnelle au Congo, à travers notamment le soutien aux Centres d’Education, de Formation et d’Apprentissage (CEFA) et au tout récent lancement du projet « MOSALA » d’employabilité des Jeunes. Ce secteur est névralgique car il doit contribuer à répondre au préoccupant phénomène des jeunes désoeuvrés délinquants, à ouvrir la porte à la diversification économique et à offrir enfin, et c’est essentiel, une perspective solide à la Jeunesse congolaise de pouvoir participer, comme elle le souhaite ardemment, au développement social, durable et inclusif, de son pays ;

 

  • je considère également qu’il est de la fierté de mon pays et de cette Ambassade de continuer d’être, plus que jamais, aux côtés des plus vulnérables, en particulier des Jeunes et des Femmes. A travers différents outils, une grande partie de l’action au Congo du Service de Coopération et de l’Agence française de Développement vise ainsi un impact social direct et visible, afin d’améliorer concrètement les conditions de vie quotidiennes des populations. Je pense : (i) à la construction et la rénovation d’importantes infrastructures sociales, telles que le Canal de Makélékélé, la route de la Corniche, la modernisation du réseau d’eau potable à Brazzaville et son drainage, comme à Pointe-Noire, Owando et Nkayi, ou encore la réhabilitation des systèmes d’assainissement du CHU de la capitale ; (ii) mais aussi à l’accès à des services sociaux renforcés, au soutien aux programmes d’insertion économique et aux projets innovants de la Société civile, ou encore à l’organisation de transferts de revenus ;

 

  • je me félicite enfin, de l’implication résolue de l’Ambassade de France, souvent en lien étroit avec la Délégation de l’Union européenne, dans le renforcement des capacités humaines de certaines administrations congolaises, et non des moindres, comme la Justice et la Police, en vue de rendre ces dernières plus efficaces, plus proches des citoyens et plus respectueuses de leurs droits. Plus généralement, il s’agit, ici, d’adresser aux autorités un encouragement amical et respectueux à poursuivre et à approfondir l’indispensable ouvrage de modernisation et de professionnalisation de l’ensemble de l’Action publique.

 

Monsieur le Premier Ministre, chers Invités,

 

Au chapitre des regrets ou, de façon plus positive et constructive, des progrès à réaliser, je voudrais rapidement mentionner les points suivants :

 

  • les retards de toutes natures qui se sont malencontreusement accumulés sur le chemin de la rénovation programmée des deux Antennes de l’Institut français du Congo, à Brazzaville et à Pointe-Noire. J’aurais ainsi aimé inaugurer, avec vous, l’achèvement de ces travaux, qui doivent redonner à ces deux établissements une allure et des services à la hauteur de la formidable mission de promotion croisée des cultures qui est la leur. Le plaisir et l’honneur en reviendront à celle qui me succèdera ;

 

  • notre impatience, aussi, de voir s’améliorer plus rapidement le climat des affaires au Congo, pierre angulaire devant permettre au secteur privé français de contribuer activement et loyalement, comme il en exprime clairement la volonté, à l’indispensable mouvement de diversification économique, au cœur duquel le Président de la République du Congo a légitimement inscrit, aux côtés des transports, de l’énergie ou du tourisme vert et mémoriel, l’essor d’une agriculture économiquement viable, écologiquement durable et socialement salutaire ;

 

  • je souhaite aussi que toute « l’Equipe France au Congo » puisse faire toujours davantage pour la formation et la mobilité croisée des Jeunes, Congolais, Français et Européens, futures élites de leur Pays, ainsi que pour le renforcement de la Société civile, qui doit être mise en mesure d’apporter toute sa créativité à l’œuvre collective de construction du Congo. J’ai bien conscience que ces échanges à encourager entre les jeunes talents des deux continents voisins exigent une fluidité administrative adaptée, qui n’est pas exactement au rendez-vous en ce moment sur le front fantasmatique des visas …. ! j’espère que nous parviendrons rapidement à traiter cette difficulté conjoncturelle, qui nous gêne tous ;

 

  • chers Compatriotes, notre communication, enfin, n’est pas ce qu’elle devrait être. Nous devons rendre plus visible et compréhensible tout ce que les membres de « l’Equipe France au Congo », qu’ils soient publics, privés ou associatifs, font dans ce beau pays, en toute transparence et en parfait accord avec les autorités, en particulier en faveur de la création de richesses et de l’amélioration tangible du bien-être des populations les plus vulnérables. Au-delà des slogans, aucun autre partenaire bilatéral de ce pays ne peut en dire autant ! En continuant de faire ce que l’on dit, nous devons être fiers de notre engagement massif, confiant et durable au Congo, de notre partenariat loyal et équilibré avec les Congolais, ancré dans la responsabilisation de chacun des acteurs.

 

Excellence Monsieur le Premier Ministre, Excellence, Monsieur le Ministre, chers Invités,

 

C’est sur cette exhortation que j’achèverai mon propos, déjà beaucoup trop long, non sans avoir toutefois salué, comme elle le mérite, l’émergence internationale, encore frémissante mais prometteuse et irréversible, de l’Afrique.

 

Car la guerre de destruction d’un autre âge, infligée depuis des mois à l’Ukraine par la Russie, de même que la violence et les prédations imposées à certaines régions d’Afrique par le groupe criminel et mafieux de Wagner, auront eu au moins ce mérite : celui de catalyser la légitime ambition du continent africain d’affirmer sa place dans le Concert des Nations et de faire entendre sa voix, forte et responsable, dans le traitement des grands enjeux du siècle. Cette ambition est légitime ; cette émancipation est juste ; elle est, j’en suis convaincu, nécessaire à la construction d’un monde de demain plus apaisé et solidaire.

 

Mesdames et Messieurs,

 

En vous remerciant sincèrement de votre attention et de votre fidélité, je vous souhaite une très belle soirée en compagnie, dans quelques instants, du célébrissime orchestre des « Bantous de la Capitale » qui va achever de nous convaincre, si besoin était, du pouvoir de la musique en général, et de la Rumba congolaise en particulier, sur l’apaisement des cœurs.

 

Vive la République du Congo ! Vive la France ! Et vive l’amitié franco-congolaise !./.

 

François BARATEAU

La Rédaction

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