RDC : Bukavu sous la menace du M23, des "volontaires" s'enrôlent pour défendre le paysLundi 3 Février 2025 - 15:20 « Je suis prêt à mourir pour mon pays ». Comme des centaines de jeunes, Juvenal Bahati Muhigirwa Ndagano est venu s'enrôler, le 31 janvier à Bukavu, dans les milices qui combattent avec l'armée congolaise, en difficulté face au M23. Après l'offensive éclair du groupe armé antigouvernemental soutenu par les troupes rwandaises qui ont fait tomber Goma, capitale provinciale du Nord-Kivu, c'est maintenant le chef-lieu de la province voisine du Sud-Kivu, Bukavu, qui semble menacée. A la hâte depuis jeudi denier, les autorités provinciales ont rassemblé la population dans un stade de la ville pour annoncer trois jours de recrutement de "volontaires" prêts à se battre. Ils ont été quelques centaines, le 31 décembre, devant les portes du stade de Funu à Bukavu, situé à environ 80 kilomètres du front où le M23 et l'armée rwandaise progressent. En tenues dépenaillées, en claquettes pour certains, ils se sont rangés en bataillons désordonnés. Les "wazalendo" ("patriotes" en swahili) sont l'un des piliers de la stratégie de Kinshasa et son armée, minée par la corruption et l'incompétence de sa hiérarchie. Face aux troupes rwandaises, réputées mieux formées et équipées, la République démocratique du Congo (RDC) mise depuis la résurgence du M23 en 2021 sur ses milices de volontaires locaux, mal armés et indisciplinés mais qui espèrent compenser ces faiblesses par leur nombre et leur entrain. « Notre principe c'est d'aller de l'avant, on ne doit pas reculer ! », intime Marcellin Bahaya, chargé de la mobilisation, en s'adressant aux nouvelles recrues. Les volontaires patientent en file indienne sur la pelouse, munis de leurs pièces d'identité. Dans les rangs, le discours est martial. Chacun se dit prêt à défendre la patrie contre "l'agression" rwandaise. Exactions « Nous allons nous battre jusqu'à ce que les Rwandais rentrent chez eux, si c'est possible, nous allons arriver chez eux au Rwanda », veut croire Amani Wangwabo qui se fait appeler "lieutenant-colonel". Cet homme se présente comme un "muzalendo" (singulier de "wazalendo") depuis 1996, date du début du conflit qui ensanglante l'Est de la RDC depuis trente ans et implique une multitude de groupes armés soutenus par divers pays et acteurs politiques internes. Face aux troupes de Kigali, équipées de drones, de missiles sol-air, de mortiers à visée laser, « nous utilisons les gri-gris que les ancêtres nous donnent afin de ne pas mourir par balles », dit-il. Mushagasha Habamungu, un volontaire qui se présente comme un enseignant, estime qu'"on ne doit pas accepter que notre souveraineté soit attaquée par des petits pays comme le Rwanda avec la complicité de la communauté internationale". Tous ces volontaires disent combattre bénévolement et ne pas recevoir de prime. Mais dans un pays où 73,5% de la population vit avec moins de 2,15 dollars par jour, les opérations d'enrôlement suscitent toujours un fort engouement parmi la jeunesse. Une fois déployés, les wazalendo sont plus réputés pour leurs exactions et leurs pillages que pour leur efficacité au combat. « Soyez disciplinés, il ne faut pas tracasser la population ! », prévient Marcellin Bahaya. Le ministre provincial de l'Intérieur, Murhula Albert Kahasha, présent pour l'occasion, assure que les nouvelles recrues recevront "une formation idéologique d'urgence", sans plus de précisions. « Ils seront rassemblés par groupes de cinq ou six sous l'encadrement d'un inspecteur et rejoindront dans moins de quatre jours le front dans le territoire de Kalehe », au Nord de Bukavu, assure-t-il.
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