Contrôle des deniers publics : les institutions compétentes dépassées par l’ampleur des tâches

Samedi 23 Novembre 2013 - 11:26

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Placée sous la tutelle du Parlement, la Cour des comptes, avec des effectifs estimés à 20 magistrats et 40 vérificateurs, gère près de 9000 comptes budgétaires, au moment où d’autres pays africains dont le Maroc et l’Afrique du sud disposent respectivement de 400 magistrats et 2000 auditeurs.

La disparité est criante, et aucun de ces deux pays africains cités n’a la même population que la RDC. Chaque rubrique budgétaire représente ainsi un compte pour la Cour des comptes, et le nombre total de comptes varie chaque année. Le budget congolais comporte en moyenne 800 à 1000 comptes de recettes, et plus ou moins 8000 comptes de dépenses, soit un total de près de 9000 comptes. Pour le répertoire 2010, ces comptes étaient détenus par 695 comptables. Chacun de ces comptables a envoyé 12 comptabilités à la Cour des comptes, soit 8300 comptabilités par an. Aussi, les ressources humaines sont loin de répondre aux défis posés par l’ampleur des tâches à accomplir.

Cette situation explique les difficultés pour cette Cour, une institution qui ne juge que les comptes mais ne sanctionne pas, de faire efficacement son travail. Sur le plan des moyens financiers également, il se pose un problème. Depuis plusieurs années, les prévisions budgétaires sont loin de représenter la réalité de la collecte des recettes. De 6 à 7000 milliards de FC de prévisions budgétaires, les réalisations n’ont jamais dépassé les 4000 milliards de FC. Il y a plusieurs explications à cette contreperformance telle le coulage des recettes. Mais il ne revient pas à la Cour de rechercher les causes. Elle constate plutôt si les recettes collectées et les dépenses effectuées correspondent à la loi budgétaire. Avec des prévisions non atteintes, certaines lignes de dépenses en paient un lourd tribut. Pour cette année 2013, le crédit de fonctionnement accordé à la Cour est de 2,2 milliards de FC. Aussi, son crédit a été revu à la baisse d’au moins 50%, et le reste a été consigné comme crédit disponible parce qu’il n’a pas été utilisé. La question des moyens tant financiers qu’en ressources humaines est capitale pour renforcer le contrôle des deniers publics, au moment où le président de la République, Joseph Kabila, a annoncé des mesures draconiennes pour faire face à la corruption, notamment la constitution d’une structure spécialisée. Mais on le sait, lors de la remise des déclarations des opérateurs miniers, il s’est posé le défi pour le pays de disposer d’une Cour des comptes capable de les certifier pour garantir leur crédibilité. La remise en état de la Cour des comptes et d’autres institutions comme l’Institut général des finances et autres sont incontournables, même si elles ne remplaceront pas les cours et tribunaux. Le travail réalisé par ces institutions spécialisées restera vain si, en aval, il n’y a aucune suite judiciaire. Au-delà, une forte implication de la population congolaise est nécessaire pour que soit appliquée la sanction.

Laurent Essolomwa