Immigration : Mamadou Dékamo Kamara loue l’action de l’ItalieMercredi 22 Avril 2015 - 20:45 Doyen du corps diplomatique africain, Mamadou Dékamo Kamara et ses pairs ont rencontré mardi à Rome Paolo Gentiloni, le ministre des Affaires étrangères Le hasard du calendrier a bien fait les choses. Alors que toute l’Europe n’est que bruits et fureurs autour de la répétition sans fin des drames de l’immigration, l’Italie, qui est prise en point de mire par les milliers de migrants dont nombreux finissent noyés en Mer Méditerranée, commence à faire mouvoir des partenaires européens jusque-là attentistes autour de ce drame. Par leur ambassadeur-doyen, Mamadou Dékamo Kamara, les ambassadeurs africains à Rome avaient lancé une invitation au ministre des Affaires étrangères qui y a répondu mardi. Leur rencontre, autour d’un déjeuner, a eu lieu en mi-journée. C’était l’occasion pour les diplomates africains de prendre un premier contact avec le chef de la diplomatie italienne et de faire le tour d’horizon des graves préoccupations du moment, dont beaucoup placent l’Italie au centre de l’attention internationale. C’est donc sans surprise que les thèmes de ces échanges cordiaux ont porté, affirme M. Mamadou Dékamo Kamara, ambassadeur du Congo en Italie et doyen du corps diplomatique africain, sur l’immigration, le terrorisme, le développement. Alors, qu’est-ce que l’Afrique dit à l’Italie pour l’occasion ? Mamadou Dékamo Kamara : J’avais lancé une invitation au ministre Paolo Gentiloni. Notre rencontre très cordiale a permis de dégager une identité de vues sur beaucoup de points. Les Dépêches de Brazzaville : Même sur l’immigration ? Vous voulez dire que l’Afrique est satisfaite de la manière dont l’Italie gère le problème des flux migratoires ? MDK : Nous vivons ici et nous voyons ce qui se passe. Je dois, en toute franchise, dire que nous sommes admiratifs devant l’effort surhumain que l’Italie déploie pour faire face au flot des migrants qui débarquent chaque jour sur ses côtes. C’est un effort titanesque, surtout parce que nous savons qu’il dépasse les capacités, surtout d’accueil, de l’ensemble de l’Italie. Nier cela ou le minimiser de notre part ne serait pas responsable. DDB : Pourtant le drame de ces milliers de jeunes venant mourir aux portes de l’Europe ne semble pas trop préoccuper les pays africains, dont nombreux sont des pays de provenance de ces migrants ! MDK : L’Afrique parle ; elle parle ! Pas plus tard que hier matin, le président Denis Sassou N'Guesso a pris position pour souligner que cette question relevait de la responsabilité commune…. DDB : Il semble bien le seul ! MDK : Il ne faut pas oublier que la voix de l’Afrique a beaucoup été ignorée dans certains aspects de cette question. Aujourd’hui, tout le monde est d’accord pour souligner que le règlement de la question libyenne sera un début de solution dans cette pression migratoire. Or, qui a écouté l’Afrique lorsqu’en 2011, elle a alerté le monde pour dire que le bombardement de Mouammar Kadhafi n’était pas la solution ? Une délégation de l’Union africaine avait même fait, à l’époque, le déplacement de Benghazi, le président Denis Sassou N'guesso avait fait partie de cette délégation, pour parler avec le colonel Kadhafi qui semblait disposer à se retirer. Mais les bombardements menés aux forceps par certaines capitales européennes, bien avant même l’aval de l’ONU, ont aggravé une situation qui se traduit aujourd’hui par la désorganisation de la Libye, et l’émergence de brigands qui profitent des migrations. Cela favorise tous les désordres qui font qu'aujourd'hui l’Italie qui n'était pas favorable au bombardement de Tripoli paye les pots cassés. Un diplomate africain a dit : l’Europe n’a pas assuré le service après-vente en Libye. DDB : Que dit l’Afrique du terrorisme qui semble aujourd’hui la menacer aussi de toutes parts ? MDK : Toutes les questions sont liées : développement, coopération lorsqu’elles sont bien senties, contribuent à éteindre les frustrations qui débouchent en violences même religieuses. Nous nous félicitons de la coopération dynamique que mène l’Italie avec nos pays. Depuis que je suis à ce poste, je n’avais jamais vu un haut-responsable italien conduire une forte délégation en tournée africaine comme l’a fait le président du Conseil Matteo Renzi, en juillet de l’année dernière. Comme vous savez, il a visité le Mozambique, notre pays le Congo et l’Angola. Et cette visite a été suivie d’une autre d’importantes personnalités entrepreneuriales italiennes, sans parler de celle que le président Denis Sassou a effectuée en Italie en février dernier avec la signature de nombreux contrats. Ce sont des signes qui ne trompent pas. L’Afrique y est très sensible. DDB : Donc, en résumant : contacts fructueux avec le Premier ministre italien, avec le ministre des Affaires étrangères. Il reste la rencontre des diplomates africains avec le président Sergio Mattarella ! MDK : En tout cas l’invitation lui a été lancée pour la Journée de l’Afrique le 25 mai prochain. Le président a accueilli cette invite avec joie. Il restera seulement à voir ce que permettra son agenda du moment. Lucien Mpama |