Immigration : la région de Basilicate, modèle d’intégration en Italie

Mardi 27 Janvier 2015 - 9:44

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La première équipe du championnat italien de football uniquement composée d’étrangers a vu le jour à Potenza.

C’est toute l’Europe frappée par la crise économique qui donne les signaux d’un mal-être avec les immigrés. Devant la raréfaction de l’offre d’emploi, les restrictions budgétaires, beaucoup de capitales européennes mettent en avant des politiques sociales qui ont pour premières cibles les populations immigrées. Surfant sur cette situation, les partis populistes viennent eux aussi ajouter leur grain de poivre accentuant la stigmatisation de « l’étranger-qui-vient-voler-le-pain-des-nationaux ».

L’expérience que mène la région de Basilicate, au sud de l’Italie, est à ce point exemplaire à plus d’un titre. Son chef-lieu, Potenza, est sans doute la ville avec non  seulement le plus d’étrangers dans les usines, les fabriques et les champs, mais aussi celle où l’on compte le plus grand nombre d’étrangers patrons d’entreprises. En dehors de la Lombardie, aucune autre région italienne ne présente un tel tableau au point que la Basilicate est aujourd’hui donnée en modèle d’intégration réussie.

Une réussite qui est économique mais qui est aussi sociale et politique. Les étrangers ici se déclinent dans une diversité notable de provenances, de races et de situations. On compte en effet parmi eux des Africains, des Asiatiques et des Européens citoyens de pays non-membres de l’Union européenne. Réfugiés politiques et étrangers soumis à permis de séjour y côtoient les Italiens. À ce jour, la région ne compte pas des situations de grosses difficultés de cohabitation.

La Basilicate vient de mettre sur pied la toute première équipe de football composée uniquement d’étrangers. Ghanéens, Gambiens, Nigérians et Maliens y sont les coéquipiers de Syriens et autres Bangladeshis. Le nom de l’association qui vient de créer l’équipe, « 'Opti Pobà », est tout un symbole. C’est un pied de nez aux xénophobes, puisqu’il se donne à lire comme « Super Pogba ». L’an dernier, le président de la fédération italienne de football s’était attiré une condamnation unanime en parlant de ces « Super Pobà » qui venaient chausser leurs crampons de joueurs d’excellence en Italie « à peine fini de manger les bananes chez eux ». Tollé, protestations : il s’en était tiré avec des excuses. Il avait voulu protester contre le trop grand nombre de joueurs étrangers dans les équipes italiennes.

Aujourd’hui, Paul Labile Pogba, qui avait minimisé ces propos à l’époque, est devenu le joueur le plus adulé du championnat italien (et le plus cher !), faisant les beaux jours de la Juventus de Turin. L’équipe des étrangers de Basilicate est en train de finaliser les formatés pour son inscription au championnat italien. Un peu de bureaucratie coince la normalisation mais tous, de l’administration communale aux instances sportives,  assurent que dès l’an prochain le championnat italien comptera une équipe de 3è division supplémentaire. Elle sera vêtue de rouge et bleu, les couleurs de la ville de Potenza, sa ville !

Lucien Mpama