Le pape : « Coup de poing à qui insulterait ma mère ! »Vendredi 16 Janvier 2015 - 13:37 Pour le pape François, la liberté d’expression est un droit et un devoir, mais le respect de la religion des autres aussi. Les attentats de Paris ont été condamnés avec la plus grande des fermetés au Vatican où le chef de l’Eglise catholique les a qualifiés de « horribles ». Suivant une ligne de cohérence qui est d’ailleurs en continuité du magistère de ses prédécesseurs, le pape François a maintes fois soutenu qu’aucun Dieu n’a jamais recommandé de tuer qui que ce soit. Et si l’Eglise catholique n’est pas exempte de reproches en ce domaine, elle qui a même établi un tribunal de l’inquisition au X1è siècle pour combattre l’hérésie notamment par la torture, cela n’est pas une excuse pour tolérer les violences d’aujourd’hui au nom de Dieu. Ces errements ne doivent pas se perpétuer. « On ne peut pas tuer au nom de Dieu », affirme-t-il avec constance. « Tuer au nom de Dieu est une aberration ». Dans l’avion qui le conduisait jeudi du Sri Lanka aux Philippines pour sa tournée apostolique en Asie, le pape argentin n’a pas esquivé les questions des journalistes. Il lui a été demandé ce qu’il pensait des attentats contre les locaux et l’équipe du journal français Charlie Hebdo le 7 janvier dernier. Aussitôt après l’horreur à Paris, il avait adressé un télégramme et condamné un tel acte insensé. Mais depuis lors le débat, feutré au départ, a enveloppé la toile pour savoir si, au nom de la liberté d’expression on pouvait rire de tout et si, donc, on pouvait réagir avec violence à une offense. Le Souverain pontife n’y est pas allé par quatre chemins. « On ne peut tuer au nom de Dieu, mais on ne peut pas non plus rire de tout. Si aujourd’hui le Dr Gasbarri (son responsable de sécurité qui se tenait à ses côtés) qui est un grand ami venait à dire des gros mots sur ma mère, il devrait s’attendre à recevoir mon coup de poing » ! Sans rejouer le film de Don Camillo le curé batailleur, et de Peppone le maire communiste, le pape qui n’a pas retroussé les manches de sa soutane et fait le coup de poing a dit clairement sa vision. Sa réponse illustrée à fait le tour du monde, d’aucuns voyant dans sa prise de position un rappel à une limite dans ce qui est permis au nom de la liberté. Un rappel qui s’encadre dans le début de grogne qui s’élève dans le monde musulman où, après l’émotion suscitée par l’assassinat des 12 journalistes de Charlie Hebdo, certains Imams même en France ne se sont pas privés de souligner que la publication mercredi de nouvelles caricatures de Mahomet par le journal français était une provocation gratuite, « une invitation à tuer son rédacteur en chef », comme l’a proféré un responsable djihadiste au Moyen-Orient. « On ne peut provoquer, on ne peut insulter la foi des autres, on ne peut la tourner en dérision! », a soutenu le pape François jeudi. « Il y a tant de gens qui parlent mal des autres religions, les tournent en dérision, font un jouet de la religion des autres: ce sont des gens qui provoquent », a réaffirmé le Souverain pontife qui n’a pas caché que les musulmans fondamentalistes d’aujourd’hui ne doivent pas faire oublier les catholiques extrémistes d’hier. « Ce qui se passe actuellement nous étonne, mais pensons à notre Eglise! Combien de guerres de religion nous avons eues ! Nous avons été aussi pécheurs ». L’équipe des caricaturistes de Charlie Hebdo a toujours soutenu que la limite de son droit à l’expression était établie par le lecteur : il aime ou n’aime pas. Mais elle ne découle pas de la révérence à des hommes ou à des institutions qui sont faillibles aussi. Dans cette logique, elle a souvent brocardé le pape et les responsables de toutes les religions qui alimentent l’actualité. Le Vatican a bien dû s’en accommoder, même lorsqu’une vignette décrivait le pape Benoît XVI donnant du « pauv' c…, je le sais ! » à quelqu’un proclamant : « Dieu n’existe pas ». On peut aimer ou moins, mais c’est cela le style Charlie Hebdo. Lucien Mpama |