Tout banal?

Oui. Tout, presque tout devient banal chez nous et partout ailleurs dans le monde, à tel point que la communauté humaine semble manquer de ressorts pour se remettre sur le droit chemin, embarquée qu’elle est dans un laxisme enivrant et consommant de façon gloutonne tout ce qui tombe dans son escarcelle. On devient indifférent à un certain nombre de dérives assommantes. Le sage conseil d'André Gide, « il est bon de suivre sa pente, pourvu que ce soit en montant », perd de son entregent. Et pour cause. 

Que dans une cour de l'école, deux élèves (de jeunes filles) poussées par un vilain jeu de mains finissent par se bagarrer et leurs camarades, au lieu de s’interposer et les séparer, filment la scène avec leurs téléphones ; qu’entretemps l'irréparable se produise, l'une des élèves tombée à la renverse la tête la première sur une table-banc en bois ne s’en relève pas, il y a de quoi s'inquiéter. 

En aucune circonstance l’école, lieu d’apprentissage par excellence, ne devrait se transformer en un théâtre lugubre où le malheur remplace l’émulation, où les apprenants s’adonnent à des besognes qui ne les honorent nullement. Et ce n’est pas tout !

Que des hommes en uniformes visiblement en mission commandée, ayant capturé de présumés criminels filment et diffusent au moyen de leurs téléphones portables l'exécution sommaire de l'un d'eux qui aurait tenté de leur échapper, il y a de quoi n'y rien comprendre. Mais que toutes ces scènes à divers degrés violentes entrent subrepticement dans les mœurs laisse  interrogateur.

L'une des questions de fond face à ce constat accablant est de savoir vers où nous conduisent nos smartphones ?  Instrument magique s’il en est, le téléphone, le voilà entré de plain-pied dans la vie de chacun, encombrant mais indispensable pour les services qu’il est censé rendre. Mais vers où nous mèneront les réseaux sociaux, si dynamiques, si irrésistibles, et si déstabilisateurs ? Bien malin qui saura démêler l'écheveau.